C'est dans cet univers que Knud, un jeune enfant (le narrateur) évolue. A l'école, il devient le bouc émissaire, un « cochon d'allemand ». Tout le monde se moque de lui : il est habillé à la mode allemande, mange des sandwiches allemands, roule avec un vélo allemand... C'est un récit tragique, émouvant. A l'âge où l'on doit rêver, Knud raconte ses cauchemars, loin de la naïveté, de la candeur et de la fraîcheur qui devraient caractériser son enfance.
L'auteur-narrateur croise les personnages, raconte des anecdotes, mais sa mère reste le sujet majeur du roman : « Ma mère vivait en pays étranger, aussi seule qu'un être humain puisse l'être. Depuis qu'elle avait été toute petite, elle n'avait fait que perdre des personnes chères, l'une après l'autre, et rien au monde - même pas la bouteille de vodka dans le placard de la cuisine - ne pouvait la consoler ». C'est le récit d'une femme courageuse, qui après la guerre, est contrainte d'en commencer une autre : celle de la reconnaissance.
Ce roman magistral a reçu de nombreux prix au Danemark. Avec une touche d'humour, mais un ton général plutôt dramatique, il saura toucher tout le monde, en ces temps où le devoir de mémoire semble occuper tous les esprits. Il était important aussi de parler de ces allemands, qui, parce qu'ils étaient allemands, ont été, dans les années 50, discriminés à l'étranger, dans les pays autrefois occupés par les nazis. Car les victimes ne sont pas seulement les juifs, les tziganes, les soldats mutilés...il y a aussi toutes ces victimes morales, auxquelles la guerre a retiré une partie de leur vie, leur innocence, leur insouciance... c'est en leur nom que Knud parle. Pour sa mère, pour lui, et pour tout ces « cochons d'allemands » qui ont dû subir l'indifférence, la méchanceté et la diffamation après-guerre, en toute impunité.
Une vérité à faire entendre.
Références
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Knud Romer cochon d'allemand
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Editions Les Allusifs numéro 056
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183 pages, août 2007